jeudi 13 décembre 2012

Big Data : c'est le chef de rayon qu'il faut former


Caractérisé avant tout par un accroissement du volume de données à analyser, le Big Data peut déboucher sur d'énormes gains de productivité, en donnant une capacité de décision aux opérationnels. Le Big Data n'influence pas la stratégie. C'est en soi une stratégie, celle de la micro-décision.

 
A l'évidence, la problématique du Big Data occupe largement les esprits. Depuis quelques mois, colloques, séminaires et autres conférences se multiplient. Les solutions techniques arrivent sur le marché (avec, en décembre 2011, la sortie de la version 1.0 de Hadoop, système de traitement de données adapté aux grosses volumétries). Mais ces solutions, développées pour gérer de vastes ensembles de données, ne répondent pas forcément aux problématiques marketing. Le volume est une chose, la capacité à l'exploiter en est une autre. Le goulet d'étranglement se situe certainement moins dans le Big Data que dans le "Big Analytics" : identifier des domaines de décision, des indicateurs clés, et proposer des modèles qui s'accordent au business. L'enjeu réside donc dans la capacité à formuler de bonnes théories (quantitatives) pour organiser le traitement (rapide) des données. 

Ce qu'apporte le Big Data ? Simplement de grands volumes des données générées par la multiplication des capteurs (smartphones, cartes de fidélité, etc.). Rien de révolutionnaire, mais un énorme gain de productivité. Ainsi, dans la distribution, l'analyse des zones de chalandise nécessite de comprendre les choix des consommateurs. Cette théorie s'incarne dans ce qu'on appelle les modèles gravitaires. Avec le Big Data, calibrer ces modèles pour construire des cartes plus précises et plus dynamiques devient envisageable.
A chaque point de vente, sa carte concurrentielle
Une conséquence très simple de l'accroissement du volume des données réside dans le concept de granularité. Le nombre ne change pas la connaissance  - la théorie des échantillons nous apprend qu'au-delà de 10 000 observations, on accroît peu la précision -, mais il permet de calculer un plus grand nombre de modèles, permettant de donner un caractère particulier ou local à la connaissance générale. A chaque point de vente sa carte concurrentielle, qui peut être consultée jour par jour et, mieux, refléter l'effet des actions marketing !

C'est cette granularité qui est essentielle. On comprend de suite où se trouve l'enjeu : des milliers de cartes produites doivent être analysées, interprétées et exploitées par des milliers de managers. Cela implique que chaque responsable de point de vente, et même de rayon, possède la "culture quantitative" qui lui permet de lire ces cartes et de comprendre les modèles. Il doit acquérir un sens des données, en comprendre les limites, en apprécier les variations. Il ne bâtira pas les modèles, mais sera amené à interpréter les résultats en fonction du contexte. Le Big Data nécessite donc le développement de nouvelles compétences, et sans doute plus encore un véritable "empowerment" des unités opérationnelles : plus de données, plus de contexte dans les modèles et les indicateurs, donc plus d'autonomie dans la décision.
La pépite du Big Data n'existe pas
La tentation est grande d'aller encore plus loin, de considérer un grain encore plus fin, en automatisant les micro-décisions. Pensons aux prix, et à cette faculté des étiquettes électroniques de les faire varier quand on le souhaite. On imagine aisément qu'à partir de modèles de prix raisonnables, on produise des milliers de tarifs tendant à l'optimal adaptés aux différents produits, points de ventes et circonstances, leur affichage étant piloté par des systèmes experts (sans doute supervisés humainement, espérons le). C'est déjà en partie le cas des grands commerces électroniques. Pour Amazon, ces modèles sont issus du filtrage collaboratifs.  

On ne doit donc pas attendre du Big Data qu'il influence les stratégies. Car il est une stratégie en soi, celle qui favorise les micro-décisions opérationnelles, sur le principe des petits ruisseaux qui font les grands fleuves. De ce point de vue, le mythe de l'orpailleur s'évanouit. Non l'avantage du Big Data n'est pas d'améliorer la qualité des études, ni de fouiller dans la masse des données jusqu'à trouver cette pépite, la corrélation qui permet de savoir mieux vendre et à moindre coût. Dans la perspective de la micro-décision, l'action l'emporte sur la connaissance. On continuera à forer les données, à les analyser, les malaxer. Mais le nouvel enjeu est de les distribuer sous forme synthétique. N'attendons pas du Big Data de grandes découverte, faisons en sorte qu'il aide les opérationnels à agir avec plus d'intelligence.

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