epuis une dizaine d'année, les acteurs - entrepreneurs, décideurs, sociétés de capital-risque de la Silicon Valley - intéressés par les éco-technologies se donnent rendez-vous chaque année au "Cleantech Forum". L'édition 2011 était une réussite : plus de 700 participants représentant 485 entreprises, 35 états des Etats-Unis et 25 pays, se sont rassemblés la semaine dernière autour du thème général de la convergence des moyens informatiques avec les éco-technologies.
Le temps d'une table ronde de 45 minutes à laquelle participaient "Sail Venture Partners" (société de capital-risque), BC Hydro (producteur d'électricité), Siemens (hautes technologies) et le NREL (laboratoire de recherche américain sur les énergies renouvelables), nous avons pu en savoir plus sur "le point de vue des utilisateurs" concernant le stockage énergétique. Aux Etats-Unis où l'on vise une production annuelle de 152 TWh d'origine renouvelable en 2035, le stockage est envisagé comme une parade sérieuse à l'intermittence de la production de source solaire, éolienne et dans une moindre mesure hydraulique. Ainsi, 29% des investissements dans les éco-technologies concernent aujourd'hui le stockage d'énergie. Pourtant, on constate encore que le stockage, sous quelque forme que ce soit, peine encore à percer au niveau commercial. Si les coûts et la fiabilité associés aux technologies constituent de réels défis, l'art de répondre aux besoins du client le sont également. C'est du moins le point de vue du modérateur de la session, un analyste du "Cleantech Group".
Le stockage est indispensable ?
D'après Hank Habicht de "Sail Venture Partners", le besoin de stockage est motivé par trois raisons principales:
1. Contribution au pic quotidien de consommation: sans stockage, de nombreuses unités de production de pointe sont utilisées durant de courtes périodes (environ deux heures par jour) pour faire face aux pics de consommation. Ceci est coûteux et inefficace. Contrairement aux centrales à gaz qui sont moins efficaces lorsqu'elles ne sont pas à leur puissance nominale, les batteries pourraient en effet permettre une alternative plus optimale parce qu'elles présentent un bon fonctionnement sur des plages de puissance variables.
2. Soutien au réseau : Le réseau électrique est amené à gérer une intermittence croissante, du côté de la production en raison de la forte pénétration des énergies non-prédictibles (solaires et éoliennes en tête) mais également du côté consommation avec l'arrivée des véhicules électriques.
3. Transmission de l'information et réactivité
Pour les autres intervenants, il est également clair que si le Gouvernement veut atteindre les objectifs énergétiques cités plus haut une (r)évolution du réseau est nécessaire tant au niveau du système physique que dans sa gestion pour en assurer la fiabilité et la viabilité. Ceci confirme la nécessité de moyens de stockage. Cependant, ce n'est pas la seule solution et elle ne sera retenue que si elle se révèle plus rentable que les autres sources alternatives, comme par exemple l'équilibrage géographique et les outils de marché.
Les utilisateurs connaissent-ils leurs attentes en matière de stockage ?
A cette question, Helen Whittaker de BC Hydro répond que les besoins techniques sont connus, mais que les différentes possibilités qu'offre le stockage soulèvent de nombreuses questions pratiques: où l'insérer? quels services seront les plus efficaces? à quels niveaux d'insertion? etc. Des travaux ont été effectués en interne chez BC Hydro pour tenter d'apporter des réponses à ces nombreuses questions. Il semble que le contexte (technique, réglementaire, géographique,...) soit déterminant. Ainsi, comme chaque cas se révèle particulier, Il est difficile pour les clients d'indiquer exactement ce qu'ils désirent de manière générale.
Farshid Arman de Siemens déplore que les puissances de stockage soient trop faibles. Les batteries disponibles à flux continu sont par exemple à un stade de développement de l'ordre de 500 kW alors qu'une seule éolienne a une puissance de 2 MW. Il voit plusieurs scénarios possibles pour l'insertion du stockage:
- au niveau du réseau de distribution, en chargeant la nuit et en déchargeant la journée pour réduire les congestions;
- au niveau des centrales de production intermittente afin de réduire la capacité de ligne de transmission nécessaire.
Hank Habicht souligne quant à lui des améliorations notables du secteur. Les principales compagnies productrices d'électricité s'intéressent en effet aujourd'hui au domaine du stockage, ce qui n'était pas le cas il y a à peine deux ans. On pense maintenant que le stockage peut avoir une place à tous les niveaux du système électrique, ce qui inclut des installations de plusieurs dizaines de mégawatts. De plus, des entreprises telles que Xtreme Power, avec 30 MW de batteries installées en soutien à des installations solaires et éoliennes, sont en train de constituer un premier retour sur expérience qui permettra d'apporter des éléments tangibles quant aux services qu'elles sont en mesure de fournir. Enfin, il confirme que pour valoriser une unité de stockage, il faut trouver un moyen d'exploiter toutes les opportunités qu'elle offre en variant les services en fonction de l'heure de la journée ou de la saison.
Le coût du stockage semble être un obstacle majeur de développement : comment le valoriser ?
Les études montrent que la réglage de fréquence est une des applications du stockage les plus rémunératrices. Cependant, Farshid Arman souligne que si les entreprises se positionnent massivement sur ce créneau, les prix risquent de chuter. D'après lui, avant de prendre en compte le prix au kWh, les paramètres principaux de performance pour le stockage sont le rendement en décharge (quantité de courant délivrée par le système de stockage sur le réseau par rapport à ce qu'il contient) et le rendement en charge (quantité de courant stocké dans le système par rapport à ce qui a été prélevé sur le réseau).
Pour David Mooney du NREL, un exemple où la valeur du stockage est aisément mesurable est celui des centrales thermodynamiques : d'un facteur de charge "naturel" de 20%, elles passent à 90% lorsqu'on leur adjoint un stockage thermique. Pour BC Hydro, le coût du stockage est encore incertain et les investissements actuels ne pourraient être envisagés sans des mesures financières (subventions). D'après Helen Whittaker il est essentiel pour les opérateurs de comprendre comment on intégre du stockage dans le système global de production, car les coûts d'opération et de maintenance sont pour l'instant méconnus et pourraient se révéler élevés. On considère d'ailleurs que le fonctionnement et les coûts associés requièrent autant d'attention que le choix de la technologie et son investissement dans le rendement technique et financier d'un projet.
Hank Habicht pense également que le coût doit être évalué globalement, en incluant les systèmes de gestion des batteries lorsqu'il y en a par exemple. Dans le cas du stockage il y a plusieurs indicateurs envisageables : coût d'une cellule (pour les batteries), coût par kW, .. Le coût est toujours un problème dans le secteur des technologies propres et c'est grâce aux projets de démonstration comme à Hawaï que l'on y verra plus clair. Enfin la modularité du stockage, qui peut être placé n'importe où, a très certainement un prix.
En conclusion, les participants - première cible de vente pour les acteurs du stockage -, semblaient relativement convaincus de l'utilité du stockage et de la variété des applications qu'il fournit. Cependant leur enthousiasme modéré tend à prouver que les sociétés productrices de batteries stationnaires, de systèmes de stockage à air comprimé ou encore de volants d'inertie devront convaincre de la nécessité d'utiliser leurs technologies plutôt que d'autres moyens pour parvenir à l'intégration des énergies renouvelables.
Au niveau réglementaire les solutions de stockage sont pour l'instant catégorisées au cas par cas en fonction du moyen de production ou du moyen de transmission, ce qui a été identifié à plusieurs reprises dans la discussion comme un problème. Si le législateur compte sur le stockage pour apporter de la flexibilité et contribuer au système électrique de demain renouvelé par les énergies intermittentes, des règles prenant en compte ces spécificités apparaissent donc nécessaires
Le temps d'une table ronde de 45 minutes à laquelle participaient "Sail Venture Partners" (société de capital-risque), BC Hydro (producteur d'électricité), Siemens (hautes technologies) et le NREL (laboratoire de recherche américain sur les énergies renouvelables), nous avons pu en savoir plus sur "le point de vue des utilisateurs" concernant le stockage énergétique. Aux Etats-Unis où l'on vise une production annuelle de 152 TWh d'origine renouvelable en 2035, le stockage est envisagé comme une parade sérieuse à l'intermittence de la production de source solaire, éolienne et dans une moindre mesure hydraulique. Ainsi, 29% des investissements dans les éco-technologies concernent aujourd'hui le stockage d'énergie. Pourtant, on constate encore que le stockage, sous quelque forme que ce soit, peine encore à percer au niveau commercial. Si les coûts et la fiabilité associés aux technologies constituent de réels défis, l'art de répondre aux besoins du client le sont également. C'est du moins le point de vue du modérateur de la session, un analyste du "Cleantech Group".
Le stockage est indispensable ?
D'après Hank Habicht de "Sail Venture Partners", le besoin de stockage est motivé par trois raisons principales:
1. Contribution au pic quotidien de consommation: sans stockage, de nombreuses unités de production de pointe sont utilisées durant de courtes périodes (environ deux heures par jour) pour faire face aux pics de consommation. Ceci est coûteux et inefficace. Contrairement aux centrales à gaz qui sont moins efficaces lorsqu'elles ne sont pas à leur puissance nominale, les batteries pourraient en effet permettre une alternative plus optimale parce qu'elles présentent un bon fonctionnement sur des plages de puissance variables.
2. Soutien au réseau : Le réseau électrique est amené à gérer une intermittence croissante, du côté de la production en raison de la forte pénétration des énergies non-prédictibles (solaires et éoliennes en tête) mais également du côté consommation avec l'arrivée des véhicules électriques.
3. Transmission de l'information et réactivité
Pour les autres intervenants, il est également clair que si le Gouvernement veut atteindre les objectifs énergétiques cités plus haut une (r)évolution du réseau est nécessaire tant au niveau du système physique que dans sa gestion pour en assurer la fiabilité et la viabilité. Ceci confirme la nécessité de moyens de stockage. Cependant, ce n'est pas la seule solution et elle ne sera retenue que si elle se révèle plus rentable que les autres sources alternatives, comme par exemple l'équilibrage géographique et les outils de marché.
Les utilisateurs connaissent-ils leurs attentes en matière de stockage ?
A cette question, Helen Whittaker de BC Hydro répond que les besoins techniques sont connus, mais que les différentes possibilités qu'offre le stockage soulèvent de nombreuses questions pratiques: où l'insérer? quels services seront les plus efficaces? à quels niveaux d'insertion? etc. Des travaux ont été effectués en interne chez BC Hydro pour tenter d'apporter des réponses à ces nombreuses questions. Il semble que le contexte (technique, réglementaire, géographique,...) soit déterminant. Ainsi, comme chaque cas se révèle particulier, Il est difficile pour les clients d'indiquer exactement ce qu'ils désirent de manière générale.
Farshid Arman de Siemens déplore que les puissances de stockage soient trop faibles. Les batteries disponibles à flux continu sont par exemple à un stade de développement de l'ordre de 500 kW alors qu'une seule éolienne a une puissance de 2 MW. Il voit plusieurs scénarios possibles pour l'insertion du stockage:
- au niveau du réseau de distribution, en chargeant la nuit et en déchargeant la journée pour réduire les congestions;
- au niveau des centrales de production intermittente afin de réduire la capacité de ligne de transmission nécessaire.
Hank Habicht souligne quant à lui des améliorations notables du secteur. Les principales compagnies productrices d'électricité s'intéressent en effet aujourd'hui au domaine du stockage, ce qui n'était pas le cas il y a à peine deux ans. On pense maintenant que le stockage peut avoir une place à tous les niveaux du système électrique, ce qui inclut des installations de plusieurs dizaines de mégawatts. De plus, des entreprises telles que Xtreme Power, avec 30 MW de batteries installées en soutien à des installations solaires et éoliennes, sont en train de constituer un premier retour sur expérience qui permettra d'apporter des éléments tangibles quant aux services qu'elles sont en mesure de fournir. Enfin, il confirme que pour valoriser une unité de stockage, il faut trouver un moyen d'exploiter toutes les opportunités qu'elle offre en variant les services en fonction de l'heure de la journée ou de la saison.
Le coût du stockage semble être un obstacle majeur de développement : comment le valoriser ?
Les études montrent que la réglage de fréquence est une des applications du stockage les plus rémunératrices. Cependant, Farshid Arman souligne que si les entreprises se positionnent massivement sur ce créneau, les prix risquent de chuter. D'après lui, avant de prendre en compte le prix au kWh, les paramètres principaux de performance pour le stockage sont le rendement en décharge (quantité de courant délivrée par le système de stockage sur le réseau par rapport à ce qu'il contient) et le rendement en charge (quantité de courant stocké dans le système par rapport à ce qui a été prélevé sur le réseau).
Pour David Mooney du NREL, un exemple où la valeur du stockage est aisément mesurable est celui des centrales thermodynamiques : d'un facteur de charge "naturel" de 20%, elles passent à 90% lorsqu'on leur adjoint un stockage thermique. Pour BC Hydro, le coût du stockage est encore incertain et les investissements actuels ne pourraient être envisagés sans des mesures financières (subventions). D'après Helen Whittaker il est essentiel pour les opérateurs de comprendre comment on intégre du stockage dans le système global de production, car les coûts d'opération et de maintenance sont pour l'instant méconnus et pourraient se révéler élevés. On considère d'ailleurs que le fonctionnement et les coûts associés requièrent autant d'attention que le choix de la technologie et son investissement dans le rendement technique et financier d'un projet.
Hank Habicht pense également que le coût doit être évalué globalement, en incluant les systèmes de gestion des batteries lorsqu'il y en a par exemple. Dans le cas du stockage il y a plusieurs indicateurs envisageables : coût d'une cellule (pour les batteries), coût par kW, .. Le coût est toujours un problème dans le secteur des technologies propres et c'est grâce aux projets de démonstration comme à Hawaï que l'on y verra plus clair. Enfin la modularité du stockage, qui peut être placé n'importe où, a très certainement un prix.
En conclusion, les participants - première cible de vente pour les acteurs du stockage -, semblaient relativement convaincus de l'utilité du stockage et de la variété des applications qu'il fournit. Cependant leur enthousiasme modéré tend à prouver que les sociétés productrices de batteries stationnaires, de systèmes de stockage à air comprimé ou encore de volants d'inertie devront convaincre de la nécessité d'utiliser leurs technologies plutôt que d'autres moyens pour parvenir à l'intégration des énergies renouvelables.
Au niveau réglementaire les solutions de stockage sont pour l'instant catégorisées au cas par cas en fonction du moyen de production ou du moyen de transmission, ce qui a été identifié à plusieurs reprises dans la discussion comme un problème. Si le législateur compte sur le stockage pour apporter de la flexibilité et contribuer au système électrique de demain renouvelé par les énergies intermittentes, des règles prenant en compte ces spécificités apparaissent donc nécessaires
ORIGINE : BE Etats-Unis numéro 241 (25/03/2011) - Ambassade de France aux Etats-Unis / ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/66231.htm
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