jeudi 15 juillet 2010

Photovoltaïque : vers un nouveau coup de frein

Baisse de 20% des tarifs du photovoltaïque au 1er septembre, quota trimestriel de mégawatts autorisés… Pour limiter le coût de la filière, le Ser fait des propositions détonantes dans une note confidentielle que s'est procurée Actu-environnement.
© Chlorophylle

Réduire de 20% dès le 1er septembre prochain les tarifs d'achat de l'électricité issue du photovoltaïque, et plafonner chaque trimestre le nombre de mégawatts (MW) éligibles à ces tarifs d'achat, pour tous les segments de la filière (installations individuelles, moyenne et grande toitures, centrales au sol). Ce sont les deux propositions détonantes que font le Syndicat des énergies renouvelables (Ser) et sa branche photovoltaïque Soler dans une note confidentielle relative ''à la mise en place d'un cadre de développement durable du photovoltaïque'' datée du 10 juin, que s'est procurée Actu-environnement.

Eviter l'emballement de la filière

Le but de ces propositions radicales : éviter un nouvel emballement de la filière, sept mois après celui qui s'était produit en novembre et décembre 2009. En deux mois, le nombre de demandes de raccordement équivalait à l'objectif photovoltaïque du Grenelle pour 2020, créant un risque de déstabilisation de l'équilibre économique de la filière et obligeant le gouvernement à mettre en place les nouveaux tarifs d'achat dans des conditions décriées par les professionnels.

Sur les quelque 4.000 MW de projets en attente au 31 mars 2010, issus de cet emballement, seuls 2.200 MW sont susceptibles de se réaliser, juge le Ser. Mais le coût pour la Contribution au service public de l'électricité (CSPE), payée par tous les consommateurs d'électricité, sera élevée : entre 825 millions et un milliard d'euros par an.

Pour y remédier, le Ser et Soler formulent un premier volet de propositions, d'ordre financier : baisse de 20% des tarifs d'achat dès le 1er septembre 2010 pour toutes les installations photovoltaïques, mise en place d'une dégressivité de 10% par an dès 2011 de ces tarifs, plafonnement à 8.000 euros du crédit d'impôt de cette énergie renouvelable, contre 16.000 actuellement.

''Dette photovoltaïque''

Deuxième proposition, radicale dans un marché libéralisé de l'électricité : plafonner chaque trimestre le nombre de MW éligibles à ces tarifs, pour tous les types d'installation. Il s'agit de faire en sorte que la hausse de la CSPE n'excède pas 200 millions d'euros par an.

Pour le second semestre 2010, le Ser propose par exemple de limiter le volume de projets à 65 MW pour les installations domestiques, 76 MW pour les moyennes toitures, 66 MW pour les grandes et 111 MW pour les centrales au sol. L'approche est similaire pour 2011, et trimestrielle cette fois. En cas de dépassement du volume autorisé pour un trimestre, les projets seraient mis en attente pour le trimestre suivant. Une fois atteinte la moitié du plafond autorisé, la file d'attente serait alors bloquée.

Sur quels critères seront choisis ces projets ? Là encore, le syndicat fait des propositions. Pour les projets de petite puissance (jusqu'à 250 kilowatts crête) prévaudrait la règle du ''premier arrivé, premier servi''. Pour les projets de puissance supérieure, cette même règle prévaudrait, avec au préalable une évaluation d'autres éléments – bilan carbone de l'installation, qualité de l'étude de conception, justification des assurances obligatoires… La construction des installations, quelle que soit leur puissance, devrait être lancée dans un délai de six mois, et achevée 18 mois plus tard à compter de la signature du contrat d'achat ''afin de limiter au maximum les projets spéculatifs en file d'attente''.

Six mois après la publication controversée du nouveau cadre tarifaire de l'électricité photovoltaïque, ce document a de quoi jeter le trouble dans la filière. ''Le Grenelle de l'environnement a imposé des objectifs très ambitieux en matière d'énergies renouvelables. Or, il n'y a toujours pas de ligne claire pour les atteindre'', juge Arnaud Gossement, avocat spécialisé en énergies renouvelables et ancien porte-parole de France nature environnement.

Cette baisse de tarifs ''paraît être une bonne chose'' à Raphaël Claustre, directeur du Comité de liaison énergies renouvelables (CLER), ''surpris'' par ces propositions. ''Le Ser doit avoir une vraie peur que de très gros volumes de projets restent en file d'attente, alors que la loi impose d'acheter pendant 20 ans l'électricité qu'ils vont produire. A terme, il y a un vrai risque de dette photovoltaïque''. Raphaël Claustre juge ''triste'' que ce dossier soit à nouveau rouvert, après avoir été géré de manière catastrophique au début de l'année 2010.

'' En lisant ce document, vous vous rendez compte que de nombreux chiffres sont surlignés en jaune : c'est uniquement un document de travail destiné à faire réagir nos adhérents et ouvrir le débat. Il n'a aucune valeur, réagit Wael Elamine, responsable du département solaire au Ser. La position de notre syndicat est aux antipodes de ce document''. Elle devrait être précisée officiellement dans les jours qui viennent.

Victor Roux-Goeken
Source: Actu-environnement.com

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