Desertec, le projet de production d'électricité d'origine solaire dans le désert nord-africain pour alimenter l'Afrique du Nord et l'Europe [1], acquiert peu à peu une structure administrative : les 12 entreprises fondatrices [2] ont créé le 30 octobre 2009 la société de planification "Initiative industrielle Desertec" (DII - Desertec Industrial Initiative). Par ailleurs, le néerlandais Paul van Son vient d'être nominé à la tête de ce nouveau consortium DII. Chef de la branche allemande du groupe d'approvisionnement néerlandais Essent entre 2003 et 2008, il présidait depuis quelques mois l'Union européenne des négociants en électricité. Le siège de la société devrait se situer à Munich, mais il est prévu de monter des succursales locales, notamment dans les pays d'Afrique du Nord.
La société de planification DII commencera par clarifier les questions économiques, techniques et légales pour la construction de centrales dans le désert et des réseaux électriques nécessaires. Un plan d'investissement doit être réalisé au cours des trois années à venir, dont devrait émerger un concept présentant les sites potentiels, les sommes d'investissements nécessaires ainsi que des plans de construction. Les premiers projets pilotes doivent prouver à court terme la faisabilité du gigantesque projet. "Un plan de conduite doit d'abord être défini pour des projets pilotes réalisables rapidement, avant de débuter une nouvelle phase avec la réalisation à grande échelle", affirme Thomas Rüschen, responsable du projet Desertec à la Deutsche Bank.
Le projet est aussi ambitieux que complexe : la nouvelle société siégeant à Munich doit trouver des partenaires prêts à investir un total de 400 milliards d'euros dans le projet. Pour le moment, chacun des douze partenaires industriels doit investir annuellement 150.000 euros comme contribution à l'activité de la société DII. D'après Thomas Rüschen, "avant que les investissements importants nous parviennent, il faudra attendre vraisemblablement entre 5 et 10 ans. En attendant, nous avons besoin d'un cercle robuste d'investisseurs". La Deutsche Bank, dont le rôle consiste pour le moment à la coordination des questions de financement, demeure, malgré la crise financière, optimiste quant à l'obtention du capital nécessaire.
La liste des candidats internationaux favorables à une participation à Desertec s'allonge en permanence. Des signaux forts de la part de la politique ont aussi été envoyés, signe que des moyens publics pourraient être débloqués. L'Union européenne soutient les nouvelles technologies et le Gouvernement fédéral allemand souhaiterait aussi accompagner le projet : la nouvelle coalition "noir-jaune" (CDU/CSU-FDP) s'est ainsi prononcée en faveur du projet Desertec dans son rapport de coalition.
Le projet Desertec a été rendu public le 13 juillet 2009 par 12 entreprises, dont 9 allemandes. Mais selon ses fondateurs, le caractère de Desertec devrait se transformer radicalement dans les prochaines années et s'internationaliser. A long terme la majorité des sociétés membres de Desertec ne devraient plus être allemandes. Les coordinateurs du projet visent un nombre d'entreprises partenaires compris entre 20 et 30, dont un nombre significatif en provenance de pays du pourtour méditerranéen. D'autres partenaires sans droit de vote devraient aussi être associés, dont le nombre ne serait pas limité et pourrait dépasser la centaine. Des Etats comme le Maroc, la Tunisie, l'Italie et la France seraient des Etats stratégiques qui ne sont pas encore représentés.
Parmi les grands défis qui lui reviendront, Paul van Son, premier président de la DII, devra notamment modérer les divergences d'intérêt au sein du consortium. En effet, certaines entreprises membres du projet sont en concurrence directe sur le marché [3]. Ainsi, mis à part les défis techniques et scientifiques de taille (pertes d'énergie durant le transport, entretien du matériel en environnement désertique hostile, effets sur l'environnement de la concentration du rayonnement solaire sur une zone précise, mise en application du CCHT, etc.) que rencontrera Desertec, les difficultés économiques et politiques (financement du projet, stabilité politique des pays "producteurs", dépendance énergétique européenne, risque de néocolonialisme, gestion de la sécurité autour des centrales, etc.) qu'il soulève sont complexes.
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[2] Membres initiaux de l'initiative : l'assureur Münchener Rück (all), les banques Deutsche Bank (all) et HSH Nordbank (all), les groupes énergétiques Eon (all) et RWE (all), le groupe industriel Siemens (all), la société d'ingénierie M+W Zander (all), les entreprises solaires Schott Solar (all), Abengoa Solar (Espagne) et Man Solar Millenium (all), le groupe agro-alimentaire Cevital (Algérie) et le spécialiste en techniques de transmission électrique ABB AG (Suisse).
[3] Par exemple Siemens et ABB pour les techniques de transmission électrique, Schott Solar et Siemens pour les technologies solaires, RWE et Eon pour l'approvisionnement énergétique
SOURCE : BE Allemagne numéro 459 (12/11/2009) - Ambassade de France en Allemagne / ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/61207.htm
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