Le stockage de l’énergie est l’un des enjeux majeurs de ces prochaines décennies. Le stockage de l’hydrogène s’avère être une piste à fort potentiel. C’est celle qu’a emprunté McPhy Energy, une jeune société française créée en janvier 2008. Ses promesses d’un stockage d’hydrogène sous forme solide à haut rendement dans des réservoirs utilisables sur site et simples d’utilisation ont suscité une vraie curiosité lors du Cleantech Forum Paris fin avril où la start-up était venue présenter les atouts de sa technologie.
Un rendement énergétique de 97%
Ces atouts répondent aux inconvénients associés aux deux principales techniques existantes de stockage et de transport de l’hydrogène. Pour être distribué, l’hydrogène est soit comprimé dans des bouteilles à haute pression, allant de 200 à 700 bars, soit liquéfié et véhiculé dans des camions citernes. L’hydrogène liquide s’obtenant à très basse température (-253°C). Dans les deux cas, la potentialité d’un phénomène d’explosion existe. Et, au-delà de leur dangerosité, ces procédés se traduisent aussi par des pertes d’énergie : un quart d’énergie perdue pour la compression, et un tiers pour la liquéfaction. Sans compter que la densité énergétique obtenue avec ces deux techniques peut être substantiellement améliorée (42 kg d’hydrogène au m3 pour la pression hyperbare, 70 kg au m3 pour la cryogénie).
Or, « on sait depuis longtemps que lorsque l’on combine chimiquement de l’hydrogène à des métaux sous forme d’hydrures, on atteint des densités bien plus élevées, qui dépassent les 100 kg de H2 au m3 », explique Pascal Mauberger, Président du directoire de McPhy Energy. S’appuyant sur les travaux du CNRS (Institut Néel), la jeune entreprise a axé ses développements sur les hydrures de magnésium. « Nous opérons dans la métallurgie du magnésium », résume le patron de McPhy. L’hydrure de magnésium offre une densité d’hydrogène stockée de 106 kg par m3, soit bien mieux que les hydrogènes liquide et hyperbare.
« Packagés » sous la forme d’iso-containers (voir image ci-contre), les systèmes de stockage d’hydrogène solide de McPhy sont réversibles (charge et décharge de H2), fonctionnent à basses pressions (ce qui permet de les connecter directement à la sortie d’un électrolyseur), présentent une grande densité volumique, et restituent 97% de l’énergie hydrogène stockée. Ils affichent une durée de vie de dix ans sans maintenance particulière, dixit le fabricant.
Trois innovations majeures
Les systèmes du Français innovent sur trois points, qui constituaient autant de freins à l’essor de l’hydrogène énergie à base de métaux : la cinétique de réaction, la conductivité thermique du matériau et le stockage de la chaleur dégagée pendant l’hydruration.
Le magnésium à l’état naturel est un matériau très lent à se charger (et à se décharger) en hydrogène (une vingtaine d’heures). Pour améliorer la cinétique, McPhy apporte une préparation mécanique du magnésium pour parvenir à un réseau de petits cristaux de magnésium nanostructurés d’une dizaine de nanomètres, en vue d’obtenir une surface de contact très importante entre les nanocristaux et l’hydrogène. En outre, des additifs collés aux parois des cristaux vont encore accélérer le temps de réaction. Résultat : le chargement (et le déchargement) du magnésium en hydrogène ne prend plus que deux à trois minutes. « C’est là une véritable innovation de rupture », se réjouit Pascal Mauberger.
La mise en contact de l’hydrure de magnésium et de l’hydrogène dégage de la chaleur qui peut bloquer la réaction si on ne l’extrait pas, et qu’il faut restituer pour ressortir l’hydrogène du grain de magnésium. Pour la conduction, McPhy utilise un composite spécifique : la poudre de magnésium nanostructurée et ses additifs est mélangée à du graphite naturel fortement expansé. « On comprime tout cela pour en faire des pastilles composites qui vont stocker l’hydrogène », précise Pascal Mauberger.
Mais que faire de cette chaleur ? L’idée de la start-up est d’utiliser un matériau à changement de phase (MCP), un alliage à base de zinc et de magnésium, pour emmagasiner cette chaleur en passant du solide au liquide, et extraire cette chaleur en passant du liquide au solide.
Ces trois inventions, protégées par des brevets, sont intégrées dans les réservoirs de McPhy dont un premier d’une capacité de 1 kg d’hydrogène a été livré fin mars dernier au CEA-Liten (Laboratoire d’Innovation pour les Technologies des Energies Nouvelles et les nanomatériaux).
Deux principaux marchés ciblés
McPhy destine ses « éponges » d’hydrogène (qui se chargent de H2 au dessus de 5 bars et se déchargent quand la pression baisse) à deux principaux marchés, le premier « mature », celui de l’hydrogène industriel et, le second « en création », celui des énergies renouvelables.
Pour le premier, McPhy Energy vise les compagnies gazières (Air Liquide, Linde, Praxair, Air Products and Chemicals…) qui fabriquent et livrent de l’hydrogène liquide à leurs clients (fabricants de semi-conducteurs, de verre plat, de métaux brillants…). La production d’hydrogène sur site est un argument pour convaincre ces industriels.
Sur le marché des ENR, il s’agirait de répondre au caractère intermittent de ces énergies nouvelles (solaire, éolien…) en stockant sous forme d’hydrogène l’énergie produite lorsque le réseau est saturé. « On ne connait pas encore le modèle économique approprié pour favoriser ces solutions de stockage, indique Pascal Mauberger. Le besoin de stockage est large, de quelques mWh pendant quelques microsecondes, à quelques centaines de MWh pendant quelques mois. » McPhy se positionnant sur ce deuxième scénario. L’hydrogène stocké pourra être réinjecté sur le réseau électrique ou dans des réseaux de gaz naturel. Dans ce dernier cas, l’option McPhy serait une façon de produire de l’hydrogène non carboné, quand on sait qu’aujourd’hui sa production pèse de 2 à 3% des émissions de gaz à effet dans le monde !
Fiche d’identité de McPhy Energy
Création : janvier 2008
Activité : Fournisseur de systèmes de stockage d’hydrogène solide à base d’hydrures de magnésium
Clients ciblés : - Compagnies gazières (Air Liquide, Linde, Praxair,…) ; - Opérateurs d’énergies renouvelables
Chiffre d’affaires : non communiqué
Levée de fonds : 1,6 millions d’euros en janvier 2009 (Emertec, Arevadelfi) ; une seconde levée est en cours pour couvrir la montée en puissance de la ligne de production industrielle des grains de magnésium
SOURCE : Cleantech Republic
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lundi 21 juin 2010
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