De plates excuses. Ronan Dunne, le patron de l'opérateur mobile britannique O2, a fait son mea culpa hier dans les colonnes du « Financial Times », alors que de nombreux Londoniens n'ont pas pu téléphoner en raison de la surcharge de son réseau urbain. Cela fait maintenant six mois que la filiale de Telefonica multiplie les incidents techniques dans la capitale. Elle a du mal à faire face à l'« explosion » de la consommation de données, multipliée par 18 depuis le début de l'année. La faute aux « smartphones », et notamment à l'iPhone d'Apple, dont O2 était le distributeur exclusif en Grande-Bretagne jusqu'au mois de novembre.
L'iPhone, un gros mangeur...
A ce jour, aucun autre téléphone ne rivalise encore avec celui de la marque à la pomme pour l'accès à Internet mobile, qu'il a réellement démocratisé. Un utilisateur d'iPhone consomme en moyenne dix fois plus de bande passante que n'importe quel autre utilisateur de « smartphone »… qui lui-même consomme environ 450 fois plus qu'un téléphone dédié à la voix. Et selon Admob, 74 % du trafic Internet mobile en Grande-Bretagne était le fait du téléphone d'Apple… alors même qu'un seul opérateur distribuait ce téléphone ! Le phénomène devrait encore prendre de l'ampleur, car à présent Orange UK et Tesco commercialisent aussi ce « smartphone » outre-Manche, en attendant Vodafone à partir du 14 janvier.
La veille, c'est le distributeur américain de l'iPhone, ATT, qui avait attisé les rumeurs dans la blogosphère. Les habitants de la ville de New York n'ont pas pu commander en ligne d'iPhone pendant le week-end. Certains en ont conclu que l'opérateur n'avait trouvé que cette solution pour soulager temporairement son réseau urbain, menacé de congestion. Un pas qu'ils n'ont pas hésité à franchir après les déclarations récentes d'ATT. L'opérateur dénonce régulièrement la surconsommation de 3 % de ses clients, qui utilisent 40 % de ses capacités de transport de données. Il y a trois semaines, le patron des mobiles, Ralph de La Vega, expliquait à Reuters que sa firme travaillait à « contraindre les accapareurs de données à réduire leur utilisation », laissant entendre qu'ils pourraient payer plus que les autres.
Avec ces interruptions de service chez O2 et ces tensions chez ATT, les craintes des opérateurs se confirment : leurs réseaux sont mis sous tension par la croissance exponentielle de l'Internet mobile. Le trafic devrait encore être multiplié par 10, voire par 40, dans les cinq prochaines années. Parmi les facteurs aggravants, n'oublions pas le développement des clefs 3G que l'on glisse dans les ordinateurs portables ou dans les « netbooks » pour se connecter via l'Internet mobile : elles consomment quinze fois plus de bande passante qu'un « smartphone ». Et les premières clefs 4G ont déjà fait leur apparition ce mois-ci chez Teliasonera à Stockholm et à Oslo, avec des débits théoriques de 150 mégabits par seconde, dix fois supérieurs à ceux qu'autorise la 3G…
Une croissance exponentielle
Les opérateurs, qui ont besoin de dix-huit mois en moyenne pour poser une nouvelle antenne mobile en zone urbaine, ont-ils été pris de court ? La plupart jurent leurs grands dieux qu'ils ont fait tout ce qui était possible et assurent que leur couverture réseau est globalement excellente. Il ne faudrait pas effrayer les clients. O2 a ainsi rappelé avoir investi 30 millions de livres (33,3 millions d'euros) dans son seul réseau londonien, et installé 200 nouvelles stations de base pour faire face à la nouvelle demande. Quant à ATT, le groupe a investi 18 milliards de dollars dans son réseau cette année. Pour l'instant, les incidents demeurent relativement circonscrits à quelques villes, et sur quelques réseaux. Mais il est probable qu'ils devraient se multiplier. Car le boom de l'Internet mobile n'a été qu'à moitié anticipé par des opérateurs qui sont allés visiter les labos des Nokia, Samsung et autres Motorola… alors que tout se préparait dans ceux d'Apple et de Google.
Source : Les Echos, 30/12/09
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