Les TIC prennent une place croissante dans la vie quotidienne et le fonctionnement des sociétés, avec des usages qui vont varier en fonction des générations. L’enjeu est tel que l’Arcep fixe des objectifs élevés aux opérateurs, comme 98% de la population française couverte en 3G en 2013. En référence aux travaux de William Strauss et Neil Howe qui ont caractérisé la Génération dite X (née entre 1960-1980), on retrouve le terme de « génération Y » pour les personnes nées entre la fin des années 1970 et le milieu des années 1990 que l’on qualifie de « digital native » ou encore net génération ». La génération Y a une maîtrise intuitive de l'informatique grand public et de l'électronique portable (téléphonie mobile, photo numérique, GPS) dont elle a été la jeune spectatrice de l’introduction massive.
Pour autant la génération Y a reçu une éducation traditionnelle (livres, cours magistraux, etc.). Il en est tout autrement pour la génération « Z », née avec les TIC et fortement connectée, qui utilise couramment les réseaux sociaux, les applications mobiles, les jeux en ligne, et même des outils d’autoformation ludiques tels que Smart.fm, véritable succès au Japon. Dans une étude récente de l’IFOP, 96% des 18-24 ans étaient membre d’au moins un des 17 réseaux sociaux testés. Avec un temps de retard sur les initiatives privées, gageons que les systèmes éducatifs, supérieurs puis élémentaires, vont progressivement se moderniser pour intégrer ces évolutions.
- La numérisation des supports va se poursuivre et la demande va augmenter avec la diffusion des tablettes. Lors du colloque scientifique Ludovia en août 2009, les experts se sont accordés pour dire que le papier devrait disparaître d’ici à 2020. Nous ne serons pas aussi catégoriques car le lien affectif avec l’édition papier perdurera encore longtemps. La bibliothèque numérique Gallica de la Bibliothèque nationale de France propose, après 10 ans de numérisation, près d’1 million de documents électroniques. On peut imaginer différentes formes de support numérique : des livres numérisés, des manuels numériques (au format flash, avec la possibilité de naviguer dans le contenu) ou encore des briques pédagogiques pour créer des cours personnalisés. On rejoint ainsi le concept de « cartable numérique » qui a comme première vertu l’allègement du poids du cartable. La lecture de supports numériques sur tablette est indiscutablement amenée à ce développer. A titre d’exemple, le PDG de Média Participations, invité par le Club ESSEC Medias-Communication le 14 janvier 2010, explique que leurs BD numérisées sur iPhone, lancées il y a un an, rapportaient 100000€ par mois.
- L’école se numérise au bénéfice de la relation entre le corps enseignant et les familles. Le lycée Saint-Sernin à Toulouse avertit par SMS du retard ou l’absence d’un enfant. Le « carnet de note électronique » permet de partager entre professeurs, parents, enfants les notes et appréciations.
- Contrairement aux idées préconçues, les réseaux sociaux ne sont pas nécessairement à bannir de l’enceinte de l’école. Des chercheurs en technologie de l’université du Minnesota[1], à partir d’observations de lycéens américains de 16 et 18 ans, ont montré que les réseaux sociaux sont de formidables outils pédagogiques permettant d’acquérir des compétences technologiques qui sont attendues aux 21ème siècle (téléchargement, édition et modification de contenu). A l’école, les réseaux sociaux amélioreraient même la participation en classe et la collaboration entre élèves. L’université de Purdue a développé récemment Hotseat permettant aux élèves de poster en temps réel, via un ordinateur ou un mobile, leurs commentaires concernant le cours, de voter pour les commentaires les plus intéressants. De son côté, le professeur peut en temps réel juger de l’assimilation de son cours et ajuster le contenu.
- Les portails de savoir concentrent une masse de connaissances utiles et fertilisent les rapports internationaux entre les universités. Le portail VideoLectures.NET (slovène) propose plus de 9000 interventions de professeurs universitaires et de chercheurs sous forme de vidéo (100 supplémentaires par semaine). La conférence peut être commentée et pourra prochainement être téléchargée. Grâce à des outils sémantiques, le portail est capable de rechercher des thèmes semblables auprès d’éminentes universités (Berkeley, Cambridge, le CERN…) et organisations. Selon le rédacteur en chef du site, les étudiants ont tendance à fréquenter avec plus d’assiduité les cours de conférenciers qu’ils auraient vu auparavant sur Internet. Des programmes visent d’ailleurs à rendre l’accès du portail plus facile sur un téléphone portable, ce qui rejoint l’initiative d’Apple, avec l’iTune University, plate-forme de distribution de contenus universitaires gratuits (Stanford, Berkeley, Duke, MIT…). Ces outils pédagogiques servent également aux étudiants de ces universités. Dani McKinney, chercheur à l’université de Fredonia, montre que les étudiants qui peuvent réécouter un cours si nécessaire, ont de meilleurs résultats à l’examen (+10% de bons résultats dans son expérimentation).
- Les serious games sont des outils pédagogiques à part entière. Ils visent à rendre attrayants et pédagogiques des concepts « sérieux » par une forme, une interaction, des règles et éventuellement des objectifs ludiques. Parmi les 92 lauréats des appels à projets sur le thème des serious gaming et le Web 2.0 retenus par Nathalie Kosciusko-Morizet en septembre 2009, « Play & Cure » vise par exemple à présenter virtuellement le corps humain (statique et dynamique) pour les étudiants de médecine et les lycéens. En matière de formation professionnelle, AXA teste un nouveau programme de formation interne à la vente dans lequel les salariés « jouent » à convaincre des clients virtuels, plongés dans un environnement en 3D, confrontés à des difficultés imprévues. AXA annonce un gain de 17000 contrats supplémentaires sur la région pilote.
- Les jeux en ligne, à condition de ne pas tomber sous addiction, seraient de formidables outils de préparation à la vie professionnelle. IBM et Seriosity Study affirment que les jeux de rôles sur Internet requièrent et développent des qualités demandées aux responsables dans le monde de l’entreprise, en particulier organisation, leadership et sens du résultat. De plus, étant parfois des milliers à jouer ensemble, les joueurs apprennent à collaborer, à jouer de leur influence, à prendre des risques, à communiquer sans barrière hiérarchique.
Vous l’aurez compris, la question n’est plus de savoir si l’éducation va intégrer les innovations numériques mais plutôt de déterminer lesquelles, à quel moment, sous quelles conditions et pour quels effets. Il en va de la performance de notre système éducatif déjà mis à mal (ex. 23ème rang pour ce qui est des compétences scientifiques dans l’étude PISA 2006) et de la compétitivité de nos entreprises qui, elles aussi, doivent évoluer dans leur approche du numérique et de leur recrutement de talents.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire